BIOGRAPHIE DE PROSPER MOITESSIER

(Extrait de la BIOGRAPHIE DES PRINCIPAUX FACTEURS D'ORGUE de J. GUEDON, 1902)

 

MOITESSIER (Prosper-Antoine), né à Carcassonne (Aude), en 1807. Ayant perdu son père à l'âge de dix ans, sa mère, pour le mettre à même d'apprendre et de continuer l'état de luthier, l'entoura de bons ouvriers. En 1819 et 1820, il reçut les premières notions de la facture d'orgues d'un nommé Pilot, natif des Vosges. Désirant se perfectionner dans cette partie, il se rendit à Mirecourt et travailla d'abord chez Nicolas Roy, l'un des plus habiles ouvriers du pays, et il alla ensuite à Paris, où il fut reçu dans les ateliers de M. Lété, actuellement à Mirecourt. Il prit aussi des leçons de M. Wuillaume, qui s'est acquis une grande réputation comme luthier, et qui était alors associé de M. Lété. En 1826, il quitta Paris, où la facture d'orgues ne semblait présager aucun avenir. De retour dans son pays, il ne trouva point d'ouvrage, si ce n'est quelques menues réparations à faire à de petits orgues. Cependant son goût pour la mécanique lui faisait préférer cet instrument à tout autre; mais ne trouvant point assez de ressources à Carcassonne, il vint en 1830 s'établir à Montpellier, nourrissant toujours l'espoir de rentrer dans les ateliers de M. Lété qui avait alors de grands projets que firent évanouir les événements de juillet de cette même année et la mort d'une personne influente. Six années se passèrent sans que Moitessier pût parvenir à se faire connaître, ne voulant pas causer le moindre tort à de vieux facteurs à qui l'on confiait le peu de réparations qu'il y avait à faire aux orgues de la contrée. Enfin, en 1836, on lui proposa de relever l'orgue du temple protestant, construit par le grand-père de M. Aristide Cavaillé. Cette restauration lui valut celle de l'orgue de Saint-Fulcrand à Lodève (Hérault), fait par Lépine, vers 1750, et en 1837 il eut l'occasion de faire un petit huit pieds pour une chapelle. A cette époque, l'impulsion donnée par M. Félix Danjou à la facture d'orgues commençait à se faire sentir jusqu'aux extrémités de la France. Chaque facteur cherchait à se distinguer par quelque amélioration dans son art. M. Moitessier ayant remarqué l'hésitation où l'on était sur le ton auquel il convenait le mieux de mettre les orgues, concilia les diverses opinions en adaptant aux claviers un mécanisme transpositeur analogue à celui que M. Roller avait appliqué aux pianos. En 1839, il présenta à l'exposition à Montpellier un orgue de salon, dont les soupapes pouvaient s'enlever à volonté et dont la soufflerie produisait un vent toujours égal au moyen d'un levier compensateur que faisait agir la table supérieure du réservoir. Ce travail fut récompensé d'une médaille d'or, et fit prendre rang à son auteur parmi les facteurs d'orgues. Depuis cette époque, il ouvrit de grands ateliers, qui n'ont point cessé d'occuper vingt ouvriers et souvent plus.

 

Voici la liste des instruments qu'il a faits ou réparés :

En 1840, un orgue de huit pieds, avec pédales, à la chapelle Sainte-Marie, à Montpellier.

1841, grand huit pieds de trente-trois jeux, avec pédale de seize pieds ouverts et bombarde, pour Sainte-Madeleine, à Béziers. Cet orgue a quatre claviers et un récit expressif.

1842, reconstruction du grand orgue de Saint-Vincent, à Carcassonne.

1842, grand huit pieds à trois claviers et pédales, à l'église paroissiale de Saint-Rémy (Bouches-du-Rhône).

1843, orgue de huit pieds à trois claviers, à l'église paroissiale de Saint-Affrique (Aveyron).

1843, grand huit pieds à trois claviers, à Cette (sic) (Hérault).

1844, huit pieds pour la chapelle des Pénitents-Blancs.

1845, huit pieds pour la paroisse Sainte-Anne.

1846, restauration de l'orgue de Notre-Dame de Montpellier. Cet orgue a été construit par le célèbre D. Bédos pour l'abbaye de Sainte-Hibérie, en 1751, et replacé à Montpellier en 1806. Un écrit trouvé dans les sommiers en fait mention. Voici la légende qui le couronnait et qui indique qu'il a été donné par l'empereur à la paroisse de Notre-Dame : Ex dono imperatoris et benevolentia archi-chancellarii imperii Gallici hujus civitatis, civis, anno domini 1805.

1846, grand huit pieds à l'église Sainte-Marthe de Tarascon.

1847, grand huit pieds pour l'église paroissiale de Forcalquier (Basses-Alpes).

Grand seize pieds en montre, de quarante-six jeux, pour l'église de la Dalbade à Toulouse.

Et nombre d'autres depuis cette date.

 

COMPLEMENT A LA BIOGRAPHIE DE MOITESSIER

Nous rajoutons ici à la liste des travaux mentionnés par Guédon ceux qui sont cités par Jean Martinod dans son Répertoire des travaux des facteurs d'orgues, ainsi que d'autres découverts plus récemment.

1853 L'Ile à Martigues (B. du Rh.), construction.

1856 Ste-Marie-Madeleine d'Aix-en-Provence, construction.

Martinod ne mentionne pas la reconstruction de l'orgue du St-Esprit.

G. Guillemin signale l'existence d'un orgue Moitessier à Remoulins (Gard) ainsi que celle d'un petit orgue à Nissan-les-Ensérune, près de Béziers. Il est d'ailleurs probable qu'il existe encore d'autres travaux de Moitessier, non encore connus à ce jour, surtout dans la région languedocienne.

 

VOIR AUSSI : Prosper Moitessier et sa descendance par Joseph Moitessier (1866-1949), son petit-fils.