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Bourse, (Commerce.) en terme de Négociants, est un endroit public dans la plupart des grandes villes, où les Banquiers, Négociants, Agents, Courtiers, Interprètes, & autres personnes intéressées dans le commerce, s'assemblent en certains jours, & à une heure marquée, pour traiter ensemble d'affaires de commerce, de change, de remises, de paiements, d'assurances, de fret, & d'autres choses de cette nature, qui regardent les intérêts de leur commerce, tant sur terre que sur mer.

Bruges en Flandre a été la première ville où l'on se soit servi du mot de bourse, pour désigner le lieu où les Marchands tenaient leurs assemblées, à cause que les Marchands de cette ville s'assemblaient dans une place vis-à-vis d'une maison qui appartenait à la famille de Vander bourse.

En Flandre, en Hollande, & dans plusieurs villes de la France, on appelle ces endroits bourses; à Paris & à Lyon, places de change; & dans les villes libres & hanséatiques du Nord, collèges des Marchands.

Ces assemblées se tiennent avec tant d'exactitude, & il est si nécessaire aux négociants de s'y trouver, que la seule absence d'un homme le fait quelquefois soupçonner d'avoir manqué ou fait banqueroute. Voyez Banqueroute & Faillite.

Les bourses les plus célèbres de l'Europe sont, celle d'Amsterdam, & celle de Londres, que la reine Elisabeth fit appeler le change royal, nom qu'elle a retenu depuis. V. en la description à l'article Change royal.

La bourse d'Anvers n'était guère inférieure à celles de Londres & d'Amsterdam, avant le déclin du commerce de cette ville.

Dans le temps même des anciens Romains, il y avait des lieux où les commerçants s'assemblaient dans les villes les plus considérables de l'empire. La bourse que quelques-uns prétendent avoir été bâtie à Rome, l'an 259 après la fondation de cette ville, c'est - à - dire 493 ans avant la naissance de Jésus - Christ, sous le consulat d'Appius Claudius, & de Publius Servilius, fut nommée Collegium mercatorum; on prétend qu'il en reste encore quelque chose, que les Romains modernes appellent loggia, la loge, & qu'ils nomment aujourd'hui la place de S. George. Voyez Collège.

C'est sur l'autorité de Tite-Live qu'on fonde cette opinion d'une bourse dans l'ancienne Rome; voici ce que dit cet auteur: Certamen consulibus inciderat uter dedicaret Mercurü oedem. Senatus a se rem ad populum rejecit: utri corum dedicatio jussu populi data esset, eum proeesse annonoe, mercatorum collegium instituere jussit. lib. II. Mais il est à remarquer que dans la pureté de la langue Latine, collegium ne signifiait jamais un édifice fait pour une société de gens; de sorte que collegium mercatorum instituere, ne peut pas se rendre par bâtir une place de change ou un collège pour les négociants. Le sens de cette expression est que les négociants furent incorporés & formés en compagnie: & comme Mercure était le Dieu du commerce, cette oedes Mercurü semble avoir été le lieu destiné aux dévotions de cette compagnie de commerçants.

La bourse des marchands de Toulouse fut établie par Henri II en 1549, à l'incitation des juges conservateurs des privilèges des foires de Lyon.

L'édit d'érection confirmé par lettres patentes du roi en 1551, permet aux marchands de cette ville d'élire & de faire chaque année un prieur & deux consuls d'entre eux pour connaître & décider en première instance de tous & chacun les procès & différents qui pour raison de marchandises, assurances, &c. seraient mus & intentés entre marchands & trafiquants à Toulouse, & par appel au parlement de ladite ville; leur permettant d'acheter ou construire un bâtiment pour y tenir la juridiction & les assemblées de ladite bourse commune.

Les marchands qu'il est permis aux prieur & consuls de choisir & de s'associer pour assister aux jugements de la bourse, s'appellent juges - conseillers de la retenue, & sont au nombre de soixante. Voyez Juges de la retenue .

La bourse de Rouen, ou, comme on l'appelle, la convention de Rouen, est de quelques années plus moderne que celle de Toulouse, n'étant que de l'année 1566, sous le règne de Charles IX : pour le reste elle lui est à peu près semblable.

La plus nouvelle de toutes les bourses consulaires est celle de Montpellier, érigée en 1691 par Louis XIV pour les marchands de cette ville, & dont la juridiction s'étend dans les diocèses de Montpellier, Nîmes, Uses, Viviers, le Puy, Mende, Lodève, Agde, Béziers, Narbonne, & Saint - Pons. Ses officiers sont un prieur, deux juges - consuls, un syndic, & un certain nombre de bourgeois pour assister avec eux aux jugements.

A Bordeaux, les consuls sont appelés juges - consuls de la bourse commune des marchands. Voyez Consuls.

Jusqu'en 1724, le lieu d'assemblée où les marchands, banquiers, négociants, & agents de change de Paris s'assemblaient pour traiter de leur commerce, était situé dans la grande cour du Palais, au dessous de la galerie Dauphine, du côté de la Conciergerie; & on l'appelait la place du Change. Mais alors on choisit l'hôtel de Nevers, rue Vivienne; & aux bâtiments qui y étaient déjà, on en ajouta de nouveaux pour la commodité des négociants, banquiers, &c. & c'est ce qu'on nomme aujourd'hui à Paris la bourse. On peut en voir les principaux règlements dans l'arrêt du conseil du 24 Septembre 1724, & dans le dictionnaire du Commerce de Savary, tom. I. page 1080. & suiv.

La bourse d'Amsterdam est un grand bâtiment de brique & de pierres de taille, qui a 230 pieds de long sur 130 de large, & autour duquel règne un péristyle, au - dessus duquel est une galerie de vingt pieds de largeur. Les piliers du péristyle sont au nombre de quarante - six, tous numérotés depuis un jusqu'à quarante - six, pour distinguer les places où se tiennent les marchands, & aider à les trouver aux personnes qui ont affaire avec eux; ce qui sans cela serait fort difficile, puisque ce bâtiment peut contenir jusqu'à 4500 personnes. La bourse est ouverte tous les jours ouvrables depuis midi jusqu'à une heure & demie ou deux heures; on en annonce l'ouverture par le son d'une cloche. A midi & demi on en ferme les portes; on y peut néanmoins entrer jusqu'à une heure en payant un certain droit à un commis établi pour le recevoir.

Outre cette bourse, il y en a encore une dans la même ville, qu'on appelle la bourse aux grains. C'est une halle spacieuse où les marchands de grains, facteurs, &c. s'assemblent tous les lundis, mercredis, & vendredis, depuis dix heures du matin jusqu'à midi, & vendent ou achètent des grains sous montre. Il y a aussi à Rotterdam une bourse très belle, & qui fait un des principaux ornements de cette ville, quoique moins grande & moins spacieuse que celle d'Amsterdam.

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Bourse a encore, dans le Commerce, plusieurs significations, dont voici les principales.

Il se dit de ceux qui ont beaucoup d'argent comptant, qu'ils font valoir sur la place en escomptant des lettres & billets de change: ainsi on dit, ce marchand est une des meilleures bourses de Paris.

Bourse commun est proprement une société qui se fait entre deux ou plusieurs personnes de même profession, pour partager par égale portion les profits, ou supporter les pertes qui peuvent arriver dans leur trafic. On dit quelquefois tenir la bourse, pour tenir la caisse. Voyez Caisse.

Bourse commune s'entend aussi de ce qui provient des droits de réception, soit à l'apprentissage, soit à la maîtrise, dans les corps des marchands & les communautés des Arts & Métiers; ce qui compose un fonds qui ne peut être employé que pour les besoins & affaires communes. Ce sont ordinairement les maîtres & gardes & jurés quîisont chargés de la perception de ces deniers, dont ils rendent compte au sortir de leur charge.

Bourse se dit encore de l'argent ou bien de quelqu'un. Avoir la bourse, manier la bourse; c'est faire la dépense. Mettre la main à la bourse, c'est dépenser. Faire une affaire sans bourse délier, c'est faire un troc de marchandises, un accommodement but à but, & sans être obligé de donner de l'argent de part ni d'autre. (G)